À l'unanimité, les hôtes des assises qui se sont tenue à Malabo, la capitale de la Guinée-Equatoriale, du 26 juin au 1er juillet, ont salué l'accueil dont ils ont été l'objet de la part des organisateurs, en particulier du président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo.
La splendide cité de Sipopo, baptisée Cité de l'Union africaine, n'a cessé de faire parler d'elle durant le sommet. Dotée d'une cinquantaine de villas modernes qu'arpentent des ruelles en asphalte toutes proprettes et cernées par d'impressionnants jets d'eau, la cité donne sur l'océan atlantique non loin. Il n'y a pas de doute que Sipopo sera aussi admirable lors de la prochaine coupe d'Afrique des nations de football co-organisée en 2012 par la Guinée-Équatoriale et le Gabon voisin. Construite à hauteur de quelque 379 milliards FCFA, elle a suscité de nombreuses critiques pour « gaspillage » de ressources financières du pays. Pour les autorités équato-guinéennes qui envisagent un développement intégral de leur nation, Sipopo sera un centre touristique pourvoyeurs d'emplois et de devises.
Jeudi 30 juin. Les chefs d'État et de gouvernement quittent un huis clos matinal pour la cérémonie de plantation d'arbres dans les encablures du site, assistent ensuite à la pose de la première pierre de l'Observatoire africain pour la science, la technologie et l'innovation que doit abriter la Guinée Équatoriale. On approche de 10 heures, heure indiquée pour l'ouverture officielle des travaux du sommet.
Une foule compacte se forme devant l'entrée principale de la grande salle des conférences où deux agents relevant des
services du protocole et de la sécurité filtrent les entrées au compte-goutte : experts, délégués, opérateurs de vue, interprètes et journalistes se poussent des coudes et rallent. Une bonne
demi-heure plus tard, en effervescence comme dans une sorte de « printemps arabe », la foule brise l'étouffement et contraint les deux « gardiens » à la reculade. Une petite « révolution de
Jasmin », pourrait-on dire, pour conquérir la liberté d'entrer en salle.
Le maître de cérémonie annonce dans un français et un espagnol impeccables l'arrivée des Premières dames d'Afrique, en fait les épouses de chefs d'État et de gouvernement, aussi nombreuses que
leurs époux. Lorsqu'il tourne l'invite en anglais, cela arrache des rires dans la salle du fait de sa formulation « débrouillée ». Arrive le tour des plus concernés, les chefs d'État, plus d'une trentaine, qui se bousculent eux aussi devant l'entrée qui leur est
réservée, où l'on voit les GDG montrer le muscle. Ce décor planté, les travaux peuvent donc commencer : exécution de l'hymne de l'Union africaine (UA), observation d'une minute de silence en
mémoire de feux les anciens présidents de Centrafrique, Ange Félix Patassé, et de Zambie, Frédéric Chiluba, décédés cette année.
Le premier à prendre la parole est le président de la Commission de l'UA, le Gabonais Jean Ping qui se félicite du chemin accompli par l'organisation panafricaine et appelle à l'unité. L'ancien président du Brésil, Luis Ignacio Da Silva, invité spécial du sommet, lui succède pour assener des coups à « ceux qui s'attaquent impunément au tiers-monde et veulent soumettre l'Afrique à leur diktat ». À Son tour, Teodoro Obiang Nguema veut croire en une Afrique qui, « sans rejeter les financements externes au continent, incite les États à assumer la responsabilité de financer les institutions communautaires ». Et d'ajouter : « C'est une question cruciale si nous voulons éviter l'ingérence que nous avons soulignée et si nous aspirons à un traitement égalitaire dans les relations internationales » (Cf. Les Dépêches de Brazzaville n°1274).
Les jeunes prennent à la parole
Le thème du sommet, l'accélération de l'autonomisation de la jeunesse en vue du développement durable est en débat après les discours officiels. Cooptés par sous-région, des jeunes organisent avec plusieurs chefs d'État des échanges empreints de passions et aussi de sagesse. Les premiers avertissent que si les gouvernements ne s'occupent pas de la jeunesse, elle s'occupera d'eux. La boutade est lancée par le représentant de la jeunesse de la sous-région d'Afrique centrale qui se voit répondre par le président malien, Amadou Toumani Touré, dans une formulation d'apaisement, qu'il serait souhaitable, avant de s'occuper des chefs d'État, que « les jeunes s'occupent d'abord d'eux-mêmes ». Mais lui, tout comme d'autres dirigeants qui l'ont suivi, n'a pas manqué de souligner la préoccupation que constitue le problème de l'emploi des jeunes pour tous les pays africains.
Offrir des opportunités à la jeunesse est un gage de stabilité, ont successivement reconnu les présidents Idriss Déby du Tchad, Paul Biya du Cameroun, le Premier ministre éthiopien, Meles Zanawi, pendant que leur homologue ougandais, Yoweri Museveni, liait la problématique au développement des infrastructures de base par les États. «Nous n'abdiquerons pas dans notre combat pour l'indépendance africaine », a tonné pour sa part la représentante de la jeunesse d'Afrique australe, une Zimbabwéenne qui a sans doute été appréciée de son président, Robert Mugabe, présent dans la salle.
On a également enregistré l'intervention du représentant de la jeunesse de l'Afrique du nord, un jeune Tunisien, étudiant en droit dont on pouvait croire à la pertinence de son speech, qu'il en savait un peu de la « révolution de jasmin » qui a allumé la flamme des contestations dans cette partie du continent. Au final, la jeunesse africaine représentée à Malabo a approuvé l'initiative prise par les chefs d'État de placer les préoccupations de cette couche de la population du continent au cœur de leurs travaux.
Et la Libye alors ?
La crise libyenne ne pouvait pas ne pas être traitée. On avait craint qu'elle ne divise l'UA, il faut retenir que cela n'a pas été le cas. Bien au contraire. En dépit des divergences, il est bien certain (voir notre réflexion en page 16) que pour la majorité des gouvernements africains, l'Occident est allé trop loin dans son engagement en Libye et qu'il est temps qu'une alternative à la violence soit trouvée.
Un mot sur Rio+20
Terminons sur les sujets proposés par les États membres à l'attention du sommet. Celui du Congo coparrainé par le Kenya portait sur la prochaine conférence des Nations unies sur le développement durable qui se tiendra l'année prochaine à Rio de Janeiro, au Brésil. Dans l'exposé qu'il a fait à la table ronde consacrée à la question, le président Denis Sassou N'Guesso a invité ses pairs à agir de concert à ce rendez-vous crucial. : « Comme à Johannesburg, en 2002, l'Afrique doit saisir cette tribune pour négocier une architecture institutionnelle du développement durable, favorable non seulement à son développement mais aussi à l'émergence de son économie au niveau global ».
La gouvernance internationale de l'environnement, hautement stratégique pour l'Afrique, a-t-il fait remarquer, « connaît
une mutation du fait d'une multiplication d'instruments juridiques internationaux, de la duplication d'institutions et de programmes, de la fragmentation des ressources et de la confusion des
rôles, voire de la compétition au sein du système onusien ».
D'où l'intérêt pour l'Afrique d'avoir sur des questions globales une approche unitaire.
À savoir que le message d'unité figurait en bonne place des déclarations entendues à Malabo. On a envie d'écrire « Malabeau », en mettant en
exergue le mot « beau », pour rendre hommage à la coquette capitale de Guinée-Équatoriale en pleine métamorphose.
Source : www.brazzaville-adiac.com 04-07-2011