Lu pour vous
Retrait de l’armée française au Burkina Faso : « La pression mise par la Russie et sa milice Wagner pour nous chasser a fini par payer »
https://www.publicsenat.fr/ MARDI 24 JANVIER 2023 Par Steve Jourdin
Ce lundi, le Burkina Faso a confirmé avoir demandé le départ des troupes françaises basées dans le pays dans un délai d’un mois. Paris a répondu attendre des clarifications de la part du président de transition Ibrahim Traoré. Christian Cambon, président LR de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, revient sur une décision « brutale » et « curieuse ». Entretien.
Le porte-parole du gouvernement du Burkina Faso a confirmé lundi que Ouagadougou avait demandé le départ des troupes françaises. Êtes-vous surpris par cette annonce ?
Ma première réaction est une réaction de tristesse. Après le Mali, la dégradation de notre présence dans cette partie de l’Afrique continue. L’annonce du Burkina n’est pas étonnante. La pression mise par la Russie et sa milice Wagner pour nous chasser de cette région a fini par payer.
Il s’agit cependant d’une décision curieuse, car l’aide de la France au Burkina a été très importante. Il y a eu une aide « décentralisée » et d’autres aides multiples. C’est désormais au gouvernement d’Elisabeth Borne de déterminer la nature des aides futures. Ce qui m’étonne dans toute cette affaire, c’est la brutalité de la nouvelle.
Comment en est-on arrivé là ?
Il faut analyser et interroger le gouvernement sur cette situation nouvelle. C’est ce que nous ferons. Il semble qu’il y ait dans cette région une opération concertée de la Russie, qui essaye de nous écarter des pays avec lequel nous entretenons des relations.
Cette décision va-t-elle entacher sur le long terme les relations entre la France et les pays de la région ?
Il va falloir vérifier la qualité et l’intensité de nos relations avec d’autres pays de la région, comme le Niger et le Tchad, où nos forces sont encore présentes. Il ne faut pas que les mêmes problèmes nous arrivent dans ces pays.
Nos liens avec le Niger et le Tchad sont certes un peu différents, mais nous avions de très bonnes relations avec le Burkina. A l’avenir, il nous faudra donc réfléchir à notre engagement et rester vigilants. Nous respectons la souveraineté des Etats, notre coopération doit s’établir avec des pays qui veulent de nous et qui ont besoin de notre soutien.
Comment envisagez-vous de la présence française au Sahel ?
Nous devons nous interroger collectivement : sous quelle forme et avec quelles règles la France doit se maintenir dans la région ? Il faut engager une remise à plat de nos relations, d’un point de vue économique, militaire et culturel. Je crois que la Russie est partie pour rester en Afrique, et il faudra en tirer les conséquences.
"Nous sommes les démons de Macron" : des dessins animés discréditent l'armée française au Sahel
https://www.francetvinfo.fr/ Christian Chesnot Radio France
"Nous sommes les démons de Macron" : des dessins animés discréditent l'armée française au Sahel et encensent le groupe Wagner sur les réseaux sociaux
Un véritable effet dominos : plusieurs pays africains refusent chacun leur tour la présence de soldats français sur leur sol, comme au Mali ou au Burkina Faso. La Russie utilise le groupe de mercenaires Wagner, pour pousser ses pions au Sahel, et décrédibiliser la France.
Après le Mali, le Burkina Faso demande à son tour le retrait des forces françaises de son territoire. Ouagadougou dit vouloir diversifier ses partenaires et envisage un rapprochement avec… Moscou. Pour encourager le sentiment anti-français, le Kremlin utilise la force Wagner et la propagande, comme par exemple, dans des dessins animés diffusés sur les réseaux sociaux. Dans l'un d'eux, on peut ainsi voir des soldats français représentés en zombies et en serpents, se présentant comme des "démons de Macron". De l'autre côté, les mercenaires du groupe Wagner, eux, sont dépeints comme des libérateurs. Le message véhiculé ne fait pas dans la dentelle, mais, à force d'être martelé, il a fini par trouver un écho dans les opinions publiques de certains pays du Sahel.
Pour Antoine Glaser, journaliste spécialiste des questions africaines, les hommes de Wagner sont le cheval de Troie d'influence russe sur le continent : "La présence des Wagner masque réellement des nouveaux accords de coopération militaire, affirme-t-il. Ils ont toujours existé au Mali, mais ils vont peut-être être signés au Burkina Faso ou dans d’autres pays de la région."
"Wagner, c’est Potemkine. Ça masque une présence russe plus importante."
Antoine Glaser, journaliste spécialiste des questions africaines
à franceinfo
Alors qu'on les signale au Burkina Faso, les hommes de Wagner sont désormais bien implantés au Mali et en Centrafrique. Dans ce dernier pays, les mercenaires russes, proches de Vladimir Poutine, "intimident et harcèlent les civils", créant un climat de peur. À tel point que, selon l'ONU, les victimes des violences de ces paramilitaires sont terrifiées à l'idée de saisir la justice par crainte de représailles.