https://amp.lepoint.fr/ avec AFP 02/11/2022 13:39:25
Nairobi (AFP) - Le Kenya a annoncé mercredi le déploiement de troupes en République démocratique du Congo (RDC) dans le cadre d'une intervention militaire régionale visant à soutenir le régime congolais face aux rébellions actives dans l'est de la RDC.
"En tant que voisins, le destin de la RDC est lié au nôtre", a lancé le président William Ruto à Nairobi lors d'une cérémonie de présentation du contingent prêt à partir, en rappelant que la force régionale doit compter également des militaires du Burundi, d'Ouganda et du Soudan du Sud, envoyés "en mission pour protéger l'humanité".
"Nous ne permettrons pas aux groupes armés, aux criminels et aux terroristes de nous priver de notre prospérité commune", a poursuivi le chef de l'État kényan, sans préciser le calendrier de déploiement des troupes.
Des sources militaires à Nairobi ont refusé de révéler le nombre de soldats kényans impliqués dans cette intervention, en évoquant des "questions évidentes de sécurité".
La RD Congo tente de contrer les activités de dizaines de groupes armés qui prolifèrent dans l'est de cet immense pays, très riche en ressources naturelles.
La tension est particulièrement vive dans la province du Nord-Kivu depuis la résurgence du M23 ("Mouvement du 23 mars"), une ancienne rébellion tutsi qui a repris les armes en fin d'année dernière. Après des semaines d'accalmie, le M23 est à l'offensive depuis le 20 octobre dans le territoire de Rutshuru, où elle s'est emparée de villes sur un axe routier stratégique desservant Goma.
Les rebelles ont notamment atteint ces derniers jours Rumangabo, siège d'une base de l'armée congolaise et du quartier général du parc national des Virunga, célèbre pour ses gorilles de montagne.
"Niveau d'alerte"
Après des mois de tension et d'accusations d'"agression", Kinshasa, qui accuse Kigali de soutenir la rébellion du M23, a décidé samedi d'expulser l'ambassadeur du Rwanda en RDC. Une décision que Kigali a "noté avec regret".
De leur côté, les autorités rwandaises ont également fin octobre accusé la RDC "d'opérer aux côtés de milices armées irrégulières", dont les FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda), mouvement de rebelles hutu rwandais dont certains impliqués dans le génocide des Tutsi en 1994 au Rwanda.
Les autorités de Kinshasa ont par le passé nié toute collusion avec les FDLR.
Cette dégradation de la situation a alarmé la communauté internationale, l'Union africaine appelant à un cessez-le-feu.
Le regain de tension dans l'est a conduit la mission de l'ONU en RDC (Monusco) à "relever le niveau d'alerte" de ses troupes en soutien aux forces armées congolaises dans leurs opérations contre le M23.
Un convoi de la Monusco a été pris à partie mardi par une foule en colère à Goma, faisant deux blessés du côté des Casques bleus.
Depuis plusieurs mois, les Casques bleus de l'ONU, présents en RDC depuis plus de 20 ans, sont accusés d'inefficacité dans la lutte contre les groupes armés qui terrorisent l'est de la RDC depuis près de trois décennies.
Un rapport d'experts mandatés par le Conseil de sécurité des Nations unies avait détaillé l'implication directe du Rwanda, "unilatéralement ou conjointement avec les combattants du M23" dans l'est congolais.
Kigali a récusé ces "allégations non valides" et avancé son "droit à défendre son territoire".
Force régionale en RDC: le président Ruto confirme l'envoi de troupes, un sommet de l'EAC prévu
https://www.rfi.fr/ Publié le 02/11/2022 - 09:28
Plusieurs mois après l'annonce de la mise en place de la force régionale de l'EAC pour lutter contre le M23 en RDC, le Kenya a annoncé ce mercredi l'envoi de troupes. Mais la force dans sa totalité peine à voir le jour, malgré des avancées.
Le Kenya semblait hésiter depuis plusieurs semaines à engager ses soldats contre les rebelles du M23 qui bénéficient, selon la communauté internationale, de l'aide de Kigali, malgré ses dénégations. Mais Nairobi a indiqué, lors d'une cérémonie de présentation du drapeau ce mercredi, le déploiement d'un contingent dans l'est de la RDC.
Près d’un millier de soldats ont suivi ces dernières semaines un entraînement préparatoire, selon l’armée kényane. Ils sont donc désormais prêts à être déployés progressivement dans l’est de la RDC pour une durée initiale de six mois, rapporte notre correspondante à Nairobi, Florence Morice.
Selon le ministère de la Défense, ces soldats doivent se rendre dans un premier temps à Goma, où est déjà installé le quartier de la force régionale. Et c’est seulement là-bas que le détail des opérations devrait être décidé en concertation avec l’armée kényane et avec le commandement kényan de la force régionale, en la personne du brigadier Jeff Nyagah.
William Ruto a déclaré avoir mené d’intenses consultations avant de décider ce déploiement. Il s’est notamment entretenu avec le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui a, dit-il, donné son accord tacite avec le président de l’Union africaine, Macky Sall, ainsi qu’avec les chefs d’États de la région : le Burundais Évariste Ndayishimiye, l’Ougandais Yoweri Museveni et le Rwandais Paul Kagame.
« Nous sommes tombés d’accord », a déclaré William Ruto ce mercredi sur le fait qu’« il est de notre responsabilité collective de préserver la sécurité de notre région et de notre continent ». « En tant que voisins, le destin de la RDC est lié au nôtre », a lancé le président Ruto, rappelant que le contingent était envoyé « en mission pour protéger l'humanité ».
Seul le Burundi, aujourd'hui l'un des principaux alliés de Kinshasa dans la région, a déjà déployé ses troupes. Mais ces soldats, dont une partie se trouve sur le sol congolais depuis bien avant la décision de mettre en place la force régionale de la Communauté des États de l'Afrique de l'Est, opèrent dans le Sud-Kivu, bien loin du théâtre militaire au cœur de toutes les attentions dans la province du Nord-Kivu.
Sommet extraordinaire de l'EAC
Est-ce la peur de voir des Congolais, de plus en plus agacés par les retards accumulés dans la mise en place de la force régionale, se tourner vers la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) ? Plusieurs initiatives ont été annoncées depuis mardi dans la région, selon nos sources.
Le président burundais et président en exercice de l'EAC, Évariste Ndayishimiye, a discuté avec plusieurs de ses homologues de la région, dont le Rwandais Paul Kagame, selon nos sources.
Ses services ont déclaré dans la foulée une réunion des chefs d'état-major des armées régionales, qui sera suivi d'un sommet extraordinaire des chefs d'États de l'EAC, probablement le 21 novembre prochain à Bujumbura. Son objectif, tenter de donner une nouvelle impulsion à une force régionale qui tarde à voir le jour, alors que la situation ne cesse de se dégrader à l'est de la RDC.
►À lire aussi : Des détails sur la force régionale bientôt déployée dans l'est de la RDC
La Monusco se retire de Rumangabo
Et face à l'avancée du M23, la dernière force militaire régulière en place dans la ville, la Monusco, a décidé de se retirer de la base de Rumangabo. « Nous avons opéré un retrait stratégique et tactique, en concertation avec nos partenaires, pour mieux préparer les prochaines étapes », a indiqué la mission onusienne sur son compte Twitter.
La semaine passée, les éléments de l'armée congolaise avaient déjà évacué ce camp stratégique, situé à l'est des Virunga, où se trouve d'ailleurs le QG du célèbre parc. Et avant l'armée, ce sont les réfugiés venus ces derniers mois qui ont fui vers Goma suite aux avancées des éléments du M23. Près de 4 000 ménages vivaient dans des conditions difficiles à Rumangabo.
🚨Nous avons opéré un retrait stratégique et tactique de #Rumangabo, en concertation avec nos partenaires, pour mieux préparer ensemble les prochaines étapes.
✅La #MONUSCO🇺🇳 reste mobilisée aux côtés des @FARDC_off et pour protéger les civils.
— MONUSCO (@MONUSCO) November 1, 2022
La base militaire de Rumangabo servait d'ailleurs de quartier général au mouvement lors de l'insurrection de 2012 à 2013. Toujours sur Twitter, la Monusco a indiqué « rester mobilisée aux côtés des Forces armés de la RDC pour protéger les civils ».
► À écouter aussi: «L'armée rwandaise vient au secours du M23 et avance sous couvert du M23», selon le chef de la diplomatie en RDC