Suite aux rumeurs de coup d'État, un climat de terreur et de psychose s'est emparé de la population centrafricaine meurtrie et lassée par la longue crise politico-militaire. Ces rumeurs sont la dérivée d'une série d'arrestations des ressortissants tchadiens séjournant illégalement sur le territoire national caractérisé par la porosité des frontières. En effet, le Président du comité de soutien du Président de la République qui serait un fonctionnaire du ministère de l'Education Nationale s'est arrogé le droit d'organiser une conférence de presse relayée à outrance sur les médias nationaux et qui accuse outrageusement les représentants des institutions de la République d'un projet de déstabilisation du régime.
Par définition, une conférence de presse est un événement médiatique durant lequel une ou des personnalités invitent les journalistes pour les informer sur une problématique et de répondre à leurs questions. Ces accusations et soupçons de coup d'État enveniment, détériorent la cohésion synergique des organes de l'État, paniquent la population et surtout découragent les éventuels investisseurs. Le mutisme coupable de gouvernement, la réaction tardive et ambiguë de la présidence de la République face à des accusations aussi graves qu'incendiaires donne le sentiment d'approuver ces âneries et interloque le citoyen lambda qui refuse de croire à la démission de l'autorité devant les responsabilités régaliennes mais s'interroge : un guérisseur traditionnel aussi peut-il organiser à son initiative une conférence ou un point presse relayé exagérément sur les médias nationaux ?
Comment une tierce personne qui ne représente aucune autorité peut-il accuser publiquement les dignitaires du pays sans être inquiété ? Au nom de quel mandat cet intru s'exprime ? Ces actes et agitations engagent-ils la présidence ou le gouvernement ? N'est-ce pas une stratégie de détourner l'opinion nationale et internationale sur les cuisants échecs du régime ? Lorsqu'on plaide la cause du roi, on se croit tout permis ? D'ailleurs, c'est quoi un comité de soutien à un Président de la République ? Quelles sont ses missions ou feuilles de route ? Quelle est sa place dans l'organigramme de la présidence de la République ? Quel est son statut juridique ? Quelles sont leurs limites ? Qui fait quoi dans ce pays ? Ce pyromane a t-il mesuré la portée de son acte ? Quelles sont les réactions du procureur de la République et du garde des sceaux ?
Même seulement une information judiciaire suffisait. Sous d'autres cieux, cet imposteur serait déjà aux arrêts et il lui fallait une batterie d'avocats de grande pointure pour qu'il recouvre sa liberté car la liste des chefs d'accusations sont longues : atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat, incitation à la haine et à la violence, usurpation d'autorité, diffamation, dénonciation calomnieuse etc...L'absence de sanctions pénales et/ou disciplinaires confirment l'aval du pouvoir ? Les preuves de ses accusations ne se résument qu'aux cinq avatars constitués volontairement prisonniers pour les besoins de la cause et le tout sous la bénédiction du pouvoir ? Croyez-vous vraiment que ces cinq cultivateurs qui sont arrêtés peuvent renverser un régime protégé par les casques bleus lourdement outillés ? Pourquoi sommes-nous étonnés que les bailleurs qui ont promis à Bruxelles se rétractent ? On note aussi l'indifférence du régime face au massacre de son peuple, on ne pense qu'à son pouvoir et à son renouvellement en 2021.
Mais à ce rythme, qui seront les électeurs de 2021 ? Existe-t-il une prime aux meilleurs acteurs qui déstabilisent par tous les moyens la classe politique centrafricaine ? Comment expliqué le fait qu'au moment où les centrafricains sont en manque de sécurité, le pyromane est accompagné dans ses déplacements par les forces de l'ordre ? Nous constatons après analyse que le pouvoir fabrique lui-même ses opposants, leur donne des armes pour le combattre car la désaffection est notoire à sein de la population y compris ses propres fanatiques au point que le régime perdrait lamentablement si les élections de 2021 étaient organisées aujourd'hui. Le pouvoir est en perte de repère, tourne en rond et se mord la queue à l'image du résultat du baccalauréat 2017.
Apres les accusations et soupçons de la classe politique, vint le tour du Président de l'assemblée nationale, alors à qui le prochain tour ? En outre la présidence de la République doit recruter un régulateur pour mettre en phase ses réactions souvent tardives à l'actualité car le monde évolue et la présidence doit prendre le bon wagon. Pour finir, nous rappelons que dans des grandes démocraties à travers le monde, on démissionne lorsqu'on perd le contrôle du tableau synoptique de gestion de la chose publique. Le Président de la République n'est pas le seul maître à tout faire. Sa responsabilité est présumée parce qu'il est le capitaine du bateau. Les responsables nommés dans les différents services doivent aussi jouer leurs partitions pour que prospère notre jeune démocratie. Mais attention, ne le dites. Si on vous demande, ne dites pas que c'est moi.
Paris le 21 juillet 2017.
Bernard SELEMBY DOUDOU
Juriste, Administrateur des Elections.