Par Li Zhijian French.china.org.cn Mis à jour le 02-05-2014
Expliquant que la communauté internationale n'a pas honoré ses responsabilités envers la République centrafricaine déchirée par un nettoyage ethnique et de lourdes pertes humaines, le chef des opérations humanitaires de l'ONU a appelé jeudi à une plus grande présence des forces de sécurité et à davantage de financements pour aider à sortir de l'escalade de la violence.
John Ging, le directeur des opérations du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), a indiqué à la presse que les milices rivales chrétiennes et musulmanes attisaient la violence intercommunautaire et que les "gens perdaient leur humanité" dans une vagues de violences interconfessionnelles sans précédent.
M. Ging, qui revenait de la ville de Boda dans le sud de la Centrafrique, a expliqué qu'il était également préoccupé par une nouvelle tendance sémantique particulièrement alarmante : la population centrafricaine accuse dorénavant les Chrétiens et les Musulmans, au lieu de pointer du doigt des "groupes armés" comme ils le faisaient auparavant.
Il a donné l'exemple de Boda, où des leaders chrétiens réclamaient l'évacuation des villageois musulmans, attisant les flammes de l'intolérance. "Les gens demandaient à être évacués de leurs propres communautés".
Par ailleurs, à Bossangoa, "tous les musulmans sont partis maintenant". Environ 2.000 musulmans ont fui ou ont été évacués avec l'aide de l'ONU, ce qui témoigne de l'échec de la communauté internationale. "C'est une solution provisoire, une solution qui n'en est pas vraiment une car ces gens vont, à un moment ou un autre, devoir rentrer chez eux", a-t-il commenté.
Les violences en Centrafrique ont pris une dimension interconfessionnelle en décembre dernier lorsque le groupe chrétien anti-balaka (anti-machette) a destitué le gouvernement musulman des rebelles Séléka. Les affrontements qui ont suivi ont conduit au déplacement de milliers de personnes, et 2,2 millions de personnes dans le pays ont besoin d'aide humanitaire.
"Cette dimension ethnique et religieuse a conduit à la segmentation et à la ségrégation des communautés. Les gens ordinaires sont en train d'être radicalisés... manipulés [et on leur fait croire] que la ségrégation est la solution à la crise", selon M. Ging, qui insiste sur la peur qui règne actuellement dans les diverses communautés du pays.
Notant que le champ d'action du gouvernement est extrêmement limité, M. Ging a déclaré que c'était dorénavant à la communauté internationale de contribuer à empêcher le désespoir et le fatalisme de diviser davantage la population du pays.
Il a ajouté que les 5.000 soldats de l'Union africaine et environ 2.000 soldats français présents sur place ne pouvaient suffire à assurer la protection de la population dans tout le pays. "La seule façon dont les gens peuvent simplement se mettre à envisager de reconstruire leurs vies passe par une vraie sécurité".
Le 10 avril, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté une résolution autorisant le déploiement de 11.800 casques bleus en Centrafrique pour tenter de protéger les civils et de mettre un terme à la violence, mais cela pourrait prendre plusieurs mois.
M. Ging déplore également le manque de moyens, en rappelant que seulement 123 millions de dollars américains sur les 500 millions qui sont nécessaires ont été débloqués, et que la saison des pluies allaient aggraver une situation humanitaire qui est déjà déplorable.
"Il ne suffit pas de discuter de ce qui est bien et ce qui est mauvais en principe, c'est ce que nous allons faire dans la pratique", a-t-il souligné. "Il relève de notre devoir de protéger ces gens".
Source: Agence de presse Xinhua